23 février 2007

Retournerai-je a Midelt? (episode 5)


En fait l’opération semblait être étudiée à la perfection. La pionne, c’est pour la surveillance, je devrai dire pour les corrections internes plutôt. Le docteur, affublé du joli nom de correspondant, devenait tous les samedi et dimanche celui qui avait le droit de me sortir, mon papa pour de faux, c’était mieux que rien pardi, le paradis en sorte.
La dernière semaine avant la rentrée s’est définitivement effacée de ma mémoire, je pense seulement que je n’ai pas du leur adresser une seule fois la parole, ou le minimum, le minimum qui vous sauve d’une baffe.
Mekhnès, sa palmeraie, il devait bien y en avoir une, comme partout au Maroc. Son zoo, inhumain et triste, comme un gosse sans son lance pierre dans la poche. Lui, je l’ai visité, j’en suis sorti bouleversé, j’ai rencontré sans doute le lion le plus malheureux de ma vie, il semblait mourir lentement, patiemment, presque comme une délivrance, en rêvant à ses forêts natales, non loin de là, sans doute.
Mon père m’avait appris que les derniers lions de l’atlas avaient disparu il n’y a pas si longtemps. Dans mes rêves, lui et moi, nous nous échappions de ces prisons et nous vivions dans les montagnes ……….
Ses rues bordées d’orangers, j’en ai bien mangé quelques unes comme une pomme que l’on cueille dans tous les vergers de France.
Et son sinistre Lycée Jean –Jacques Rousseau.
C’est pas une école ce truc ! Pour voir le toit, il faut regarder le ciel, il est si long que même en courant très, très vite, on n’arrive jamais à l’autre bout ! Et quand tu reviens t’es en retard à l’appel du repas !
« Hum ! Pas bien bonnes les notes, faudra remédier à çà mon garçon, ici il n’y a que de bons élèves »
Premier entretien avec la directrice, mes parents semblaient très satisfait des signes distinctifs d’autorité.
Aujourd’hui encore, je me dis que cette phrase, je l’ai entendu maintes et maintes fois, elle me raisonne dans les oreilles à chaque fois que l’on m’inscrivait dans une école,
« Enfin, une école qui va le prendre en main » pensaient-ils sans le moindre regard vers leur indésirable gamin.
Et si, en plus ici, il y a Driss, c’est la fin de tout, un concentré en modèle gigantesque de Midelt, de Mibladen et de ce sinistre et lugubre lycée.
Trouver le dortoir, chercher l’étage, la chambre, le lit, cela demandait déjà plusieurs heures. D’autres enfants, aussi heureux que moi, la mine triste, déballaient, ou regardaient leur maman déballer aussi leurs affaires, se demandait eux aussi ce qu’ils avaient bien pu commettre comme crime horrible pour se retrouver là,
« Ça c’est pour le sport, tu vois un short, des tennis et les chaussettes blanches »
« Tu me regardes dis quand je te parle ! Quand tu seras seul, maman ne sera plus là pour t’expliquer ! »
Tu parles maman qui m’explique ! Depuis deux ans, ma mère sans doute débordée par le travail avait convaincu son mari qu’il lui fallait une bonne, et comme la promotion le permettait pourquoi se gêner.
C’était la bonne qui préparait tout.
Chemise après chemise, pantalon après pantalon, chaussures après chaussures, chaussettes après chaussettes, j’apercevais avec angoisse, cette valise se vider irrémédiablement, lentement avec appréhension, avec à chaque instant le mode d’emploi, l’explication, la leçon, en me montrant :
« Ça, ça sert à ça ! »,
« Et ça, à ça ! »
« Et surtout, tu ne te trompes pas, parce que ça, ça va avec ça »,
« Ça ne va pas avec ça »………………….
« Dis, tu m’écoutes quand je parle !

16 février 2007

Retournerai je à Midelt (épisode 4)


“Patrick, viens donc par ici, on doit te parler avec ta mère”
Pourquoi tant de solennel, pour me dire tout simplement que j’allais à l’école de Midelt, parce que c’est sûr, ils m’appelaient pour l’école et pour Midelt. Sans doute encore quelques promesses de plus à accepter. Pas de problème, tout ce qu’ils veulent, moi c’est Midelt et rien d’autre.
« Tu te souviens des Martin, tu sais ceux qui t’ont gardé quand tu étais à Mibladen ? »
« ………………………… !!!!! »
Pourquoi cette question. Bien sur que je m’en souviens. Des gens très gentils, mais quand même, que venaient-il faire au beau milieu de notre conversation, Mibladen c’était réglé.
« Et bien figure-toi que leur fille Huguette va être pionne à Mekhnès, c’est pas une chance çà ? »
« ………………………… !!!!.. » Bon, on ne va pas y passer la famille et les chiens non !
Une chance, pour qui ? Pour quoi ? Ça me fait quoi moi que cette fille soit pionne à Mekhnès, bon elle sera pionne c’est d’accord et tant mieux pour elle.
Vont-ils en venir au fait, je croyais pourtant que nous allions parler de l’école, cela ne semble pas le cas.
« En plus, monsieur Dolivet, le médecin militaire tu te souviens ? Et bien, il est muté à Mekhnès, c’est drôle non ? »
« ……………………………………. »
A part tout ce monde qui semble s’être subitement donné rendez-vous à Mekhnès, je fais quoi moi à la rentrée ?
« Et bien, avec ta mère, on a pensé que justement Mekhnès c’est une école faite pour toi, on t’y a inscrit pour la rentrée dans une semaine. »
« …………………………….. »
De cette minute, j’en retiens toutes les secondes une par une, Mekhnès 200 kilomètres, pas possible !
Pourquoi fallait-il qu’elle m’éloigne systématiquement de la maison !
Pourquoi acceptait-il de plus en plus souvent sa domination!……………
La minute se terminait, sans un mot, je me sauvai, la gorge et les poings serrés, ils vont voir ce qu’ils vont voir ! D’ailleurs, si j’avais voulu répondre, je pense qu’aucun son ne serait parvenu à sortir, sans exploser de rage, comme je savais le faire suite à une quelconque injustice.
C’est ainsi qu’à neuf ans et demi, j’allais être pensionnaire à temps complet, parce qu’en plus je n’avais pas entendu le mot visite, lance-pierre, vacances, dans leur argumentation.
J’appris bien plus tard que Claude, mon frère, avait subi le même sort, mais à …………..quatre ans, de quoi vais-je me plaindre ! Mon sort était bien plus enviable !
Dans le même sac tous les deux.

10 février 2007

Retournerai-je a MIdelt (episode 3)


L’été perdait pied lentement chaque jour, face aux coups de boutoir de l’automne. Au début, on ne voit pas trop le changement et peu à peu, l’été cède du terrain, l’automne vainqueur prend alors possession de son territoire et de la lumière.
Pour moi, c’était la saison de la chasse, de la pêche ……….et de l’école.
Pour la première fois, j’entendis parler d’indépendance du Maroc, cela faisait un an environ. Aux explications que je demandais, mon père me disait qu’il avait deux pays dans son cœur la France, qui pourtant ne lui avait rien offert de bien réjouissant, et l’autre le Maroc, une jeunesse fabuleuse d’aventurier comme il en avait rêvé le soir en France tout gamin à Méligny le Petit, des histoires de David Croket
Il m’expliqua que ce deuxième pays à présent était un pays indépendant, je ne compris rien à ses explications, si ce n’est que je vis dans ses yeux anormalement tristes comme une fin proche.
« Mais ne t’en fait pas ici on a besoin de moi »me dit-il, cela devait me rassurer.
Pourquoi m’avait-il dit cela. Bien sûr qu’ils en avaient besoin de mon papa, c’est lui qui à présent forme les ingénieurs agricoles du moyen atlas.
L’incertitude de ma rentrée me paralysait rien qu’à l’idée d’y penser.
Que vais-je devenir ?
Irais-je à Midelt ? Oui sûrement ! Pensais-je pour me rassurer en attendant les paroles réconfortantes de mon père.
J’avais perfidement abordé plusieurs fois le sujet avec lui, mais ses réponses qui n’en étaient pas m’angoissaient.
Pourtant, j’avais été un enfant exemplaire pendant toutes ces vacances, je faisais en sorte intelligemment de ne jamais fâcher ma mère, il était impossible de deviner ce qu’elle pensait, plus fermée qu’une huître, il fallait surtout accepter son joug, et son caractère dominateur. Je ferai ma révolution plus tard, plus tard quand je serai fort.
Je n’ai jamais loupé de sieste, j’ai rangé ma chambre tous les jours, les dents de devant se souviennent encore des furieux coups de brosse matinal.
J’acceptais non sans angoisse parfois de ne pas les accompagner à la chasse, ce jour-là était alors pour moi une terrible attente.
Attente du soir pour savoir si les cartouches avaient bien « pété ».
Attente d’un « merci fiston ».
Attente du tableau de chasse, et des exploits de Toto, mon chien, mon idole, c’était un peu de moi qui avais profité de cette chasse.
J’allais être récompensé pour tous ces actes de soumission, c’est sûr, il ne pouvait en être autrement après tout ce que je venais lâchement d’accepter.

09 février 2007

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01 février 2007

Retournerai-je a Midelt episode (1+2)


Retournerai-je à Midelt (épisode 1+2)

« Tu as de trop mauvaises notes, tu as raison, cette école n’est pas pour toi, nous allons y réfléchir avec ta mère, pour le moment profite des vacances »
Et bien voila ! contrat rempli, à la rentrée, j’irai a nouveau à Midelt, certes je referai sans doute connaissance avec la baguette de Driss, mais cette éventualité aussi bizarre que cela puisse paraître ne me dérangeait pas, sans doute avais- je aussi oublié le goût si particulier de son outil de motivation
J’avais promis, avant qu’on me le demande, que j’aurai de bonnes note comme pour convaincre encore plus mon père qu’il avait eu raison de ne pas me réinscrire à Mibladen.
De cet été là, il ne me reste pas de souvenir spécifique de ces vacances, sans doute y ai-je chassé le moineau, renforcé mon adresse au lance pierre, j’ai sûrement escaladé maintes et maintes fois la MIMOUNA. La petite colline se dressait fièrement seule au milieu de cet immense plateau qu’est le moyen atlas. Toute proche de la maison elle servait de sanctuaire aux marocains pour le Haït el Kabîr, des taches de sang témoignaient des sacrifices des moutons, j’y trouvais même des coquillages, on m’explique qu’il y a très très longtemps, la mer était à Midelt, pour moi la mer c’est Imsouane, Agadir ou Safi, je ne crus jamais cette histoire.

Cet été là, j’ai du faire souffrir quelques scorpions que j’attrapais sans appréhension avec un bambou fendu en deux. Je les envoyais sans aucune peine à la mort à la manière de César. Un cercle de feu, un combat singulier de gladiateurs apeurés et le vainqueur se suicidait.
J’avais une autre passion, une quête même, aussi forte et prenante que le graal pour les parfaits. Autour de la maison, je cherchais des hyènes sans jamais en voir une.
La nuit en rentrant du billard ou de chez quelques amis nous les voyions dans les phares des voitures, leurs yeux si particuliers brillaient, cet animal me hantait, non pas par la peur ancestrale que cet animal mythique dégageait, mais par son anonymat, son mystère.
Les marocains la diabolisaient. Malgré tout, je voulais en voir une, comme ça, pour savoir, pour connaître. De toute façon, le risque et l’inconsciente jeunesse faisaient partie de mon quotidien.
Je dévorais livres et dictionnaire pour trouver une photo de ce mythique animal.
Mais jamais je n’en vis pour de vrai, je doutais aussi de cette histoire de bête féroce capable d’attaquer et de tuer des chiens et des moutons.
La nuit aussi je traquais des gerboises, espèce de minuscule kangourou, et quand je ne voyais pas de gerboises, c’était aux moineaux à qui je m’en prenais. Une lampe électrique, ma carabine air comprimé, j’étais comme mon père l’a été, le grand chasseur du moyen atlas, mais lui avait combattu des sangliers avec un poignard comme seule arme, ou même des panthères, des articles de journaux et des photos de l’époque que je lus bien plus tard, me prouvaient qu’il ne me mentait pas.
La rentrée approchait sournoisement sans que je ne m’en aperçoive.
« Patrick, un match de foot ça te dit ? »
Tu parles si ça me dit. Mon père m’avait inculqué le virus, j’y connaissais rien mais je faisais semblant d’aimer, il parlait, je l’écoutais et j’aimais. C’était aussi simple que cela. Il en était comme cela pour toutes ses passions, foot, chasse, pêche, billard.
« A Casablanca il y a un match, le grand Reims contre Boca-junior champion d ‘Amérique du sud ». Tu te rends compte de l’événement ! Le grand Reims !
C’est en convois de plusieurs voitures, mais beaucoup de Peugeot 203, que les quelques 400 Km qui nous séparaient de ce nomment existant furent accomplis.
1 à 1 ce fut le résultat. Dans l’équipe de Reims 3 noms me reviennent en mémoire 45 ans plus tard, Barreau gardien de but, Piantoni et le grand Kopa, que je reverrai 20 ans plus tard à Reims et sur un terrain de foot.