13 juin 2008

Mes années collége (épisode 13)


Alors je me réfugiais chez Alain. Lui non plus n’avait pas la télé, il m’attendait tous les dimanches. Rituellement. J’aimais sa mère, et ses cafés au lait de quatre heures avec des grands morceaux de pain dedans. J’admirai aussi son père qui partait dés le dimanche soir à son travail à l’usine de talc de Luzenac, la plus grande carrière de talc du monde. Il n’en revenait que le vendredi d’après. Lui aussi, de tout son corps, de ses mains pétrissait rageusement une vie meilleure pour ses deux garçons.
Silencieusement, consciencieusement, nous déballions nos soldats.
Hétéroclite armée que nous avions là, lui et moi. Point de course à l’armement, les revenus de nos parents ne le permettaient pas. Nos armées n’en avaient pas les moyens. Armées de pauvres. Nous composions notre armada, d’amour, de bric et de broc, de soldats de plomb et de plastique, de Cow-boy et d’indiens, de chevaliers et de policiers. Même Zorro combattait, dans l’armée composite du dimanche après midi. Selon les sous des parents, nous avions droit de temps à autre à un nouveau soldat qui venait renforcer joyeusement notre maigre armada. Pour les chars d’assaut deux carrés de bois, l’un plus grand que l’autre cloué l’un sur l’autre, un clou pour le canon et le tour était joué. Nous avions décidé de nous limiter à quelques chars, trois ou quatre, je ne sais plus. Un ou deux avions rafistolés de colle et de décalcomanie, achevaient les armées en présence. Et puis notre imagination faisait le reste ……
– T’es touché……..
– Ton char flambe………
– Ton soldat et mort………
– Ton avion est en panne…………….
Personne ne contestait, nous acceptions l’évidence. Il gagnait, je gagnais, peu importe. Lui et moi, drogués pour quelques heures, avions oublié le film que nous aurions tant aimé voir.
La guéguerre des soldats de plomb est terminée, je dois m’en aller. J’accepte avec joie l’amour et le café au lait que sa maman me propose. Il fait presque nuit, je n’aime pas l’hiver. Il fait toujours froid et noir dans mon âme vagabonde qui cherche désespérément quelque chose, je ne sais pas encore quoi. C’est triste non !
Je ne voulais ni ne pouvais rentrer à la maison, papa travaillait encore, sûrement. Et maman, maman………….. !
Je n’avais pas de maman le dimanche après midi, quand il faisait noir et que j’avais peur du lendemain.
J’errais.
Et toujours la même trouille au ventre qui me prenait tous les dimanches soirs à l’heure où les paysans trayaient leurs vaches. J’angoissais du lundi. Je n’avais que très rarement terminé mes devoirs. J’aurai juste le temps demain dans le car de copier sur Alain, Émilien ou Robert si comme moi, ils ne cherchaient pas eux aussi un complice.
Tous mes dimanches soirs maudits s’achevaient douloureusement, la peur au ventre. L’obsession du lendemain vissée au corps.
Je hais toujours le dimanche soir encore aujourd’hui. Ce ne sont plus les professeurs qui me terrorisent, mais à croire que mon corps et mon esprit se sont intoxiqués à la panique du dimanche, et qu’ils réclament encore leur dose hebdomadaire de détresse. Mes dimanches à Serres sur Arget m’ont drogué à vie, à mort.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonsoir Patrick,

En ce qui me concerne mes Dimanches soirs sont moins difficiles depuis que je suis commerciale !
Effectivement le Lundi est consacré à l'administratif alors je travaille chez moi.
Même si ce n'est pas une journée particulièrement light, le Dimanche soir a une saveur moins aigre !
Célina

Anonyme a dit…

Bonsoir Patrick,
je vois que tu es revenu de ton voyage et comme d'habitude j'ai un train de retard.
Il faut dire que je ne suis pas très présente devant le PC c'est la période des examens et des concours et j'ai du travail plus que je peux en assumer.
La hantise du dimanche soir doit être associée à un autre sentiment sinon elle t'aurait quittée depuis longtemps.Une autre interférence fait qu'elle dure dans ta chair et ton mental. Respire à fond, tu n'es plus à Serres.
Tu dois penser que je n'ai aucune hantise, détrompe-toi, je suis malade dès que quelqu'un est en retard, mais vraiment malade et ce sera ainsi pour toujours, seuls mes proches sont au courant et savent pourquoi.
Bonne soirée
Avec toute mon amitié

شامة a dit…

c'est sup cher bloger

Pas a pas a dit…

bonjour celina
quel plaisir de te lire, toi aussi quand meme tu stresse au lundi ,un peu
je connais des tas de personnes comme cela
n'oublies pas je te dois un repas
a bientot
patrick

Pas a pas a dit…

viviane
et moi alors , je deteste le retard chez moi, et ne l'accepte pas chez les autres alors!
amities
patrick

Pas a pas a dit…

inconnu qui ecrit en arabe
je suis allé sur ton blog, mais si je comprends un peu votre langue je ne l'ecris et ne la lis pas
Par contre je sais que vous etes de imintanaoute, et le prochain village que je raconte c'est imitanaoute , et j'y ai vecu
amities
patrick

vincent a dit…

salut patrick
je me remets dans tes pas.
Moi c'était pas les soldats. On jouait plutôt à la ferme.j'avais une palanquées de vaches (des Salers bien sûr). Les jeudis ,(hé oui!!! pas de mercredis) quand il faisait beau, on installait les bâtiments de fermes, les prés (avec des plaques de mousse ramassées sur des vieux murs. On y mettait un temps fou!!! Et quand on avait fini d'installer (c'est très con) il était l'heure de tout remballer.
ensuite, fallait faire les devoir et comme toi la hantise du vendredi........
Aux soldats on y jouait "en vrai" dans le parc du château. on sautait les murs derrière le village et on faisait des combats (notre guerre d'algérie). Mais le plus souvent, c'était le "gâcher" ou le "castiller" (le gardien du château) notre ennemi. Interdit de jouer dans le parc de madame la contesse.
Avouons qu'elles étaient dangereuses les mares recouvertes de lentilles d'eau.
Les après-midi-télé-vinasse c'était réservé à l'hiver........
Mais ça c'est une autre histoire...