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Ainsi se déroulaient mes journées, entre panique de l’école et corvées à la maison.
Pour mon jeune âge, j’avais une force et une corpulence qui avait incité mon père à me demander de l’aider encore plus à la ferme. Un désir qui dans sa bouche équivalait à un ordre, de ceux que vous ne pouviez refuser.
J’abandonnais avec plaisir et sans rancune à ma mère, même avec un plaisir caché et jouissif, le ramassage des œufs, le nettoyage des lapins ou le sarclage du jardin. Elle n’appréciait ce legs, que de très mauvais cœur. Je me jetais sur le tracteur. Le plaisir de garder les moutons était devenu maintenant du passé.
Une promotion certes, mais passé le temps euphorique du changement, je n’allais pas tarder à le regretter, tant le travail était devenu pénible, et tant j’aurais aimé partager la vie normale, et semble t’il insouciante de mes copains du village.
Mon horizon de corvées venait subitement prendre de la hauteur, et de l’espace. Et surtout allait occuper mes dimanches et vacances pendant les 4 ou 5 années qui allaient suivre.
Dans ces conditions il ne pouvait en être autrement que ce qui m’attendait à la fin de l’année scolaire.
– Hierard moyenne générale sur l’année 9,13. Redoublement.
Je me souviens encore quelque 40 ans plus tard de ma moyenne au dixièmement prêt, tant ce chiffre me fit honte. Il est là, gravé dans le cœur, et dans la tête au fer rouge de ma flétrissure. Honte de redoubler et de risquer d’aller rejoindre les cancres là bas en bas de la classe, là où s’entassaient les oubliés et les cancres. Je redoutais aussi inconsciemment ce que l’on médisait des redoublants de ma classe.
J’allais moi aussi l’année prochaine subir les même quolibets des profs, et moqueries de mes concitoyens écoliers. De cela il n’en était pas question personne ne s’est encore moqué de « Patrick le chasseur de l’Atlas ».
J’aurais aimé que l’on me dise au moins que j’avais fais des grands efforts et que pour moi 9,13 ce n’était pas trop mal. Au moins j’avais échappé au ridicule. Je ne serai pas aiguillé vers les classes de « transitions ». Les classes de la honte, elles étaient la risée de tous. Moi aussi monstrueusement, je participais à cette primitive et invective hallali sur ces pauvres gosses. Nous savions tous que ceux là n’iraient plus bien longtemps à l’école. Certains profs même se moquaient ouvertement de ces pauvres gosses, certains nous disaient même que ces élèves n’allaient en classe que pour toucher les allocations. Rire et racisme mélangés nous acquiescions. Ils étaient les rebus, les tuberculeux en quarantaine de l’éducation nationale, les porteurs de la Burka du savoir. Ce n’était pas une classe de transition, mais une ligne directe à grande vitesse vers l’exclusion. Ou au mieux « Ils seront pour certains flics ou fonctionnaires et mangeront des poulets aux hormones » chantait Ferrat.
Les profs, les premiers avaient établi une inconsciente sélection dans les classes. Ils ne s’occupaient que des meilleurs. Les autres instinctivement se sentant repoussés du partage du savoir, se repliaient en ordre, un à un honteusement au fond de la classe. Un pacte tacite alors régissait ce fond de classe, l’ignorance mutuelle.Bien entendu mes parents se sentirent eux aussi obligés de participer à ma mise à mort scolaire. J’étais un « fainéant et un bon à rien ». Sobriquet qui ne quittera plus jamais leurs lèvres quand il s’agira de décrire le dernier rejeton de la famille. Parfois le mot chance et orgueil accompagnera leur vocabulaire
Pour mon jeune âge, j’avais une force et une corpulence qui avait incité mon père à me demander de l’aider encore plus à la ferme. Un désir qui dans sa bouche équivalait à un ordre, de ceux que vous ne pouviez refuser.
J’abandonnais avec plaisir et sans rancune à ma mère, même avec un plaisir caché et jouissif, le ramassage des œufs, le nettoyage des lapins ou le sarclage du jardin. Elle n’appréciait ce legs, que de très mauvais cœur. Je me jetais sur le tracteur. Le plaisir de garder les moutons était devenu maintenant du passé.
Une promotion certes, mais passé le temps euphorique du changement, je n’allais pas tarder à le regretter, tant le travail était devenu pénible, et tant j’aurais aimé partager la vie normale, et semble t’il insouciante de mes copains du village.
Mon horizon de corvées venait subitement prendre de la hauteur, et de l’espace. Et surtout allait occuper mes dimanches et vacances pendant les 4 ou 5 années qui allaient suivre.
Dans ces conditions il ne pouvait en être autrement que ce qui m’attendait à la fin de l’année scolaire.
– Hierard moyenne générale sur l’année 9,13. Redoublement.
Je me souviens encore quelque 40 ans plus tard de ma moyenne au dixièmement prêt, tant ce chiffre me fit honte. Il est là, gravé dans le cœur, et dans la tête au fer rouge de ma flétrissure. Honte de redoubler et de risquer d’aller rejoindre les cancres là bas en bas de la classe, là où s’entassaient les oubliés et les cancres. Je redoutais aussi inconsciemment ce que l’on médisait des redoublants de ma classe.
J’allais moi aussi l’année prochaine subir les même quolibets des profs, et moqueries de mes concitoyens écoliers. De cela il n’en était pas question personne ne s’est encore moqué de « Patrick le chasseur de l’Atlas ».
J’aurais aimé que l’on me dise au moins que j’avais fais des grands efforts et que pour moi 9,13 ce n’était pas trop mal. Au moins j’avais échappé au ridicule. Je ne serai pas aiguillé vers les classes de « transitions ». Les classes de la honte, elles étaient la risée de tous. Moi aussi monstrueusement, je participais à cette primitive et invective hallali sur ces pauvres gosses. Nous savions tous que ceux là n’iraient plus bien longtemps à l’école. Certains profs même se moquaient ouvertement de ces pauvres gosses, certains nous disaient même que ces élèves n’allaient en classe que pour toucher les allocations. Rire et racisme mélangés nous acquiescions. Ils étaient les rebus, les tuberculeux en quarantaine de l’éducation nationale, les porteurs de la Burka du savoir. Ce n’était pas une classe de transition, mais une ligne directe à grande vitesse vers l’exclusion. Ou au mieux « Ils seront pour certains flics ou fonctionnaires et mangeront des poulets aux hormones » chantait Ferrat.
Les profs, les premiers avaient établi une inconsciente sélection dans les classes. Ils ne s’occupaient que des meilleurs. Les autres instinctivement se sentant repoussés du partage du savoir, se repliaient en ordre, un à un honteusement au fond de la classe. Un pacte tacite alors régissait ce fond de classe, l’ignorance mutuelle.Bien entendu mes parents se sentirent eux aussi obligés de participer à ma mise à mort scolaire. J’étais un « fainéant et un bon à rien ». Sobriquet qui ne quittera plus jamais leurs lèvres quand il s’agira de décrire le dernier rejeton de la famille. Parfois le mot chance et orgueil accompagnera leur vocabulaire